Lithurgus cornutus femelle © Remi-Rudelle
BEEDET - Résultats

BEEDET - Identification des abeilles sauvages et domestiques par des méthodes moléculaires non destructives

Il existe plus de 20 000 espèces d’abeilles sauvages dans le monde et près de 1000 en France qui jouent un rôle essentiel dans la pollinisation des végétaux sauvages et cultivés. Cette grande diversité d’espèces d’abeilles qui se différencient les unes des autres en termes de morphologie, de mobilité, de préférence florale, de sites de nidification et de période de vol, rassemble des pollinisateurs irremplaçables qui sont aussi aujourd’hui menacés. Pour enrayer ce phénomène, il est important d’évaluer les facteurs (pratiques agricoles, gestion des territoires etc..) ayant un impact sur la santé des abeilles domestiques (résistance au varroa par exemple) mais aussi sur l’abondance et la diversité des abeilles sauvages.

Lithurgus cornutus femelle © Remi-Rudelle

Le déclin des insectes pollinisateurs est aujourd’hui un fait avéré rapporté dans de nombreux médias, journaux scientifiques. Pour mettre fin à cette disparition rapide et massive des insectes pollinisateurs diverses actions ont été engagées en France telles que le plan pollinisateurs (2021-2026) et en Europe avec la rédaction de l’article 8 de la Commission Européenne (Juin 2022) qui prévoit ‘ l’obligation d’inverser le déclin des pollinisateurs et de parvenir à une évolution à la hausse des populations de pollinisateurs jusqu’à atteindre des niveaux satisfaisants. Cette obligation s’appuiera sur la mise en place d’une méthode de surveillance des pollinisateurs’.  

Cependant à l’heure actuelle les inventaires et les suivis d’insectes pollinisateurs se heurtent à d’importants verrous méthodologiques liés à un manque d’entomologistes et de méthodes fiables, standardisées permettant les identifications jusqu’ à l’espèce. A côté des verrous méthodologiques, il existe également une forte attente sociétale et institutionnelle pour suivre les populations de pollinisateurs dans des différents contextes environnementaux avec des méthodes qui préservent les spécimens vivants.

Dans ce contexte nous avons proposé de mettre au point un protocole non létal, facilement remobilisable par des instituts ou des associations pour identifier les abeilles sauvages à partir des traces qu’elles peuvent laisser sur les fleurs en butinant tels que des soies, des fèces ou encore de la salive.

Démarches

Un dispositif expérimental en conditions contrôlées a été conçu. Quatre plants de fraisiers, couramment utilisés comme pollinomètres, ont été placés dans des enceintes ‘insects proof’ ou exposés à l’air libre pendant 3 jours.

  • Dans la condition A les plants de fraisiers ont été mis en contact avec 4 abeilles appartenant à 3 espèces piégées au filet et photographiées pour identification (Antophora plumipes, Andrena sp. et Lasioglossum sp).
  • Dans la condition B les plants ont été exposés à l’air libre avant la collecte des fleurs.
  • Dans la condition C les plants de fraisiers n’ont pas été en contact avec des insectes pollinisateurs.

Après 3 jours les fleurs sont récoltées individuellement puis congelées et stockées à – 20°C avant l’extraction des ADNs provenant des traces.

Beedet schema protocole
schéma du protocole : plants de fraisiers en enceinte étanche ou à l'air libre

En préalable aux travaux de metabarcoding ADNe nous avons construit une base de barcodes de référence pour les abeilles sauvages de la région d’Occitanie. Des minibarcodes (16S d’insectes de 250 bps) classiquement utilisés pour identifier de l’ADN partiellement dégradé, provenant d’échantillons environnementaux (ADNe) ont été séquencés.

Résultats

Optimisation des conditions d'extraction et d'amplification des ADNs

  • Mise au point du protocole d'extraction de l’ADN à partir de traces de passage d’insectes déposées sur les fleurs.
  • Définition des conditions d’amplification du minibarcode 16S adaptées à plusieurs genres en partant de très faible quantité d’ADN potentiellement dégradé.
  • Optimisation des conditions de séquençage MiSeq (profondeur de lecture, prix).

Traitement bioinformatique des données

Il est possible de détecter deux des espèces introduites manuellement : Antophora et Andrena (A).  Cependant plusieurs espèces d’abeilles sauvages appartenant à différents genres mais également des séquences d’autres insectes pollinisateurs comme des syrphes (Philantus) sont aussi détectées.

La détection de séquences dans les conditions C (pas d’introduction manuelle d’abeilles) provient du fait que les fraisiers utilisés dans cette expérience provenaient de pépinières extérieures.

En revanche, nous avons trouvé beaucoup de contaminations d’homo sapiens et de séquences correspondant à de l’ADN 16S de fraisiers. Pour la poursuite des travaux, il faudra limiter l'effet de ces contamination par exemple en utilisant des oligonucléotides de blocage qui visent à réduire l’amplification des contaminations.

La preuve de concept est concluante :  en conditions contrôlées, il est possible de détecter le passage d’insectes à partir de fleurs butinées.

Participants

Structures INRAE

  • UMR DYNAFOR - Dynamiques et écologie des paysages agriforestiers
  • UMR GenPhySE - Génétique, Physiologie et Systèmes d'Elevage

 

Contact - coordination

 

Voir aussi

Pour en savoir plus : consultez le bilan scientifique et retrouvez les principales publications sur le HAL BIOSEFAIR